Le mars 2000
Les dirigeants, qu’ils soient politiques ou économiques, adoptent systématiquement un double langage dès qu’il s’agit de s’exprimer sur le chômage. D’une part, le chômage est décrit comme un drame qui frappe la population et crée "l’exclusion" et la "fracture sociale". Il faut donc "se battre pour l’emploi" afin que les malheureux chômeurs retrouvent leur dignité par leur dur labeur. Belles paroles... D’autre part, dans un accès de schizophrénie chronique, ils parlent de plus en plus souvent des chômeurs comme d’ "assistés", de "chômeurs de confort", bref de sales paresseux asociaux qui vivent au crochet du contribuable sans chercher à "s’en sortir".
Dans cette logique, on va donc créer des aides à l’embauche destinées aux entreprises pour soi-disant "redynamiser le marché du travail". Ben tiens ! On sait pertinemment que ces aides conduisent uniquement au développement du travail précaire (CDD, emplois-jeunes, stages "de formation", etc) et non pas a créer des emplois stables. La loi sur les 35 h, qui partait au départ d’une idée généreuse (travailler moins pour travailler tous) , ne servira finalement qu’â introduire un peu plus la flexibilité avec ses conséquences néfastes (détérioration des conditions de travail, problèmes de santé, asservissement de la vie privée). Pendant ce temps, I ’Etat réduit les indemnités et allocations destinés aux chômeurs, en particulier en cas de chômage de longtie durée (allocations dégressives), et les aides deviennent de plus en plus difficiles a obtenir. il ne reste aux chômeiirs que deux alternatives accepter le premier boulot de merde venu et perdre sa vie a la gagner ou continuer a sombrer dans la misère...
Cela dit, le chômage ne fait pas le malheur de tous. Les "entrepreneurs" et les agences d’intérim sont bien content d’avoir a leur disposition ce qu’on appelle un "volant de chômage", c’est-a-dire un potentiel de main-d’oetivre prét à accepter n’importe quel emploi pour suvivre et, de ce fait, corvéable à merci. Pour ceux qui ont encore un emploi, et se font exploiter au sein du système salarial, c’est un puissant frein à toute revendication et contestation. Quand on sait que l’employeur trouvera facilement quelqu’un pour remplacer un salarié trop récalcitrant, on évite d’ouvrir sa gueule !!! Cela divise salariés et chômeurs, alors qu’ils sont tous exploités.
Les partis politiques ne sont pas en reste et savent parfaitement jouer du spectre du chômage à des fins électoralistes, tout en favorisant la précarisation du travail dès qu’ils sont au pouvoir.
Il est bien sûr plus que nécessaire de lutter pour obtenir des conditions de vie décentes, que ce soit pour les salariés (amélioration des conditions de travail et augmentation des salaires) ou pour les chômeurs. Nous soutenons donc les propositions du Collectif des Chômeurs et Précaires rétablissement d’un fond d’urgence, droit au RMI pour les moins de 25 ans, relèvement des minima sociaux et droit à un revenu garanti pour tous, suppression de la dégressivité des allocations chômage. De plus, nous aimerions mettre l’accent sur la nécessité d’un véritable service public, qui donne accès gratuitement et à tous aux transports, télécommunications, soins, éducation, etc. C’est l’utilité sociale qui doit primer sur les profits.
Mais au-dela de ces revendications immédiates, il nous faut continuer la lutte pour un jour changer ce système injuste et bâtir ensemble une société sans classe, oû chacun puisse donner selon ses moyens et recevoir selon ses besoins. Les anarchistes proposent de s’organiser sur d’autres bases sociales : fédération des producteurs et des consommateurs, autogestion des structures (usines, services, communes, écoles...) oû les décisions sont prises par tous en assemblées générales et où la délégation de pouvoir est remplacée par le mandatement contrôlable et révocable de délégués responsables de tâches techniques bien précises.