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Sommet de l’Otan à Strasbourg en avril 2009

Interview d’un membre de Résistance des Deux Rives

Article du Monde libertaire

Le lundi 30 mars 2009

Dans les précédents articles parus dans le Monde Libertaire, le groupe de Strabourg de la FA a évoqués l’état de la mobilisation et la situation strasbourgeoise. Il nous a semblé important de donner la parole aux camarades allemands. Nous avons rencontré Rudolph Rhein, un activiste du collectif Résistance des deux Rives, afin qu’il nous livre son sentiment sur la mobilisation côté allemand.

Depuis quand le collectif Résistance des deux Rives existe-t-il et sur quelle base politique s’est-il crée ?

Rudolph Rhein : Nous existons depuis début avril 2008. Dès qu’on a appris que le sommet de l’Otan se tiendrait chez nous, ce sont les habituels militants formant la petite mouvance de la gauche radicale de l’Ortenau qui se sont regroupés et ont „crée“ Résistance des deux rives.
Notre base politique est à l’image des différents groupes dont nous sommes issus : des groupes anarchistes, antifascistes ainsi que des groupes issus de la contre-culture. Ces groupes existent pour certains depuis de nombreuses années, mais l’expérience de la mobilisation contre le G8 à Heiligendamm leur a apporté une dynamique nouvelle.
Parmi nous, il y a aussi des individus qui nous ont rejoint seulement maintenant et qui se sont politisés à travers la mobilisation anti-otan.
Dans notre quotien de militant anti-otan nous essayons de poursuivre nos idéaux de la prise de décision par consensus, ce qui est difficile dans les grands collectifs auxquelles nous participons.

Quel rôle votre collectif a-t-il joué jusqu’à aujourd’hui dans la mobilisation et la préparation du contre-sommet ?

R.R : En tant que groupe local qui n’avait aucune expérience d’un tel événement, nous avons d’abord dû nous mettre en réseau. On a participé à un nombre incalculable de rencontres de préparation dans toute l’Allemagne et à Strasbourg. Eh oui, nous sommes mêmes allés au forum social européen de Malmö en Suède pour rencontrer les militants et nouer des contacts personnels.
Peu à peu nous avons pris conscience qu’en tant que groupe local, on était en quelque sorte prédestinés à prendre en charge l’infrastructure locale, et l’infrastructure la plus importante à notre avis est le camp à Strasbourg. Nous sommes donc en train de préparer depuis des mois le village avec nos camarades strasbourgeois, ce qui représente bien plus de boulot que nous ne l’imaginions. A cela s’ajoute un problème lié au caractère transfrontalier de la mobilisation : le problème de la langue. Chaque rencontre avec les camarades strasbourgeois prend deux fois plus de temps car chaque mot doit être traduit.
Parallèlement nous faisons beaucoup de travail par rapport aux médias ainsi qu’en direction de l’opinion publique, en organisant des conférences et des infotours. Sinon, nous organisons aussi régulièrement des concerts.

Comment la population allemande et surtout celle de Kehl perçoit-elle la tenue du sommet de l’Otan chez elle ?

R.R : En général on n’entend ni ne voit aucune opposition (à part la nôtre…). Naturellement on entend ici où là des gens qui se plaignent du coût que va entraîner le maintien de « l’ordre ». Mais ce ne sont jusqu’à maintenant que quelques voix.
Notre tentative de créer une espèce de rencontre/forum pour les citoyens, afin de leur donner la possibilité de participer et de contribuer à la mobilisation n’a rencontré que peu d’écho.
Je pensais qu’à cause des mesures de sécurité drastiques et hallucinantes qui visent le centre ville de Kehl il y aurait beaucoup plus d’opposition, du moins de la part des habitants de Kehl. Leurs libertés fondamentales, qui d’ordinaire leur sont si chères, seront très restreintes, mais ils l’acceptent sans broncher. La plupart sont inquiets pour leur commerce, leur travail et leur propriété qui pourrait subir des dommages lors d’émeutes de la part des méchants autonomes. Cette peur est attisée délibérément par la police allemande et en particulier par le ministre de l’intérieur conservateur du Bade-Würthemberg, par le biais de fausses annonces évoquant des milliers « d’émeutiers lourdement armés et très violents » et un « village regroupant des criminels ».
Mais qui sait ? Peut-être la population de la région va-t-elle nous surprendre et participer à la manifestation, aux blocages, ils visiteront peut-être le village…nous les accueillerions à bras ouverts.

Est-ce que tu penses que l’histoire de l’Allemagne joue un rôle important dans la forte mobilisation contre le sommet de l’Otan ?

R.R : Par le passé allemand tu parles du national-socialisme, de l’holocauste et de la deuxième guerre mondiale que l’Allemagne a déclenchée.
Pour l’instant je ne n’ai pas vu entrer cela en ligne de compte pour la gauche, du moins pas dans des publications.
Je ne parle ici que pour moi : en tant que militant antifasciste et anarchiste socialisé en Allemagne, l’histoire allemande joue toujours un rôle dans mon engagement politique. La confrontation avec ce passé est une sorte de base dans ma manière d’agir. C’est entre autres pour cela que je suis antimilitariste.
Si j’appliquais ce raisonnement à d’autres militants de gauche, ils devraient tous être dans la rue en avril à Strasbourg !

Pour finir, peux-tu nous dire comment la police allemande se prépare au contre-sommet de l’Otan ?

R.R : La police allemande sera présente avec environ 15.000 policiers. Le terrain d’action est très étendu, de Baden-Baden en passant par Kehl jusqu’à Fribourg où se trouve le centre de commandement de la Bao atlantique. C’est notre chance, 15.000 policiers risquent vite de se perdre…Pour l’instant la police n’est pas intervenue.
En 2007, avant le sommet du G8, une importante vague de répression avait frappé les structures qui préparaient le contre-sommet, ce qui avait encore amplifié la mobilisation. Je ne pense pas qu’ils referont la même erreur.
Mais ne nous leurrons pas, la répression viendra certainement. Il faudra bien qu’ils justifient cet appareil policier et répressif complètement dingue et démesuré. Mais nous sommes prêts à y faire face. Des deux côtés du Rhin, les legal-teams sont prêtes à soutenir les personnes frappées par la répression. C’est là que la solidarité devra être mise en pratique, nous ne devons pas laisser les victimes seules face aux forces répressives.
Pour finir sur une note optimiste ; je pense qu’à Strasbourg, Kehl et Baden-Baden, nous montrerons à l’opinion publique internationale que des milliers de personnes refusent la « politique » de l’Otan. C’est le plus petit dénominateur commun. Au-delà de ça, ce que chacun(e) en fera, dépend finalement des individus. Une chose est sûre : il y aura beaucoup d’actions créatives et nombre d’entre elles seront à caractère anarchiste.

Le site Résistance des deux rives


Page spéciale Sommet de l’OTAN à Strasbourg et Kehl en avril 2009

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